«Je m'appelle Jean-Marie Le Clézio. Je suis écrivain. Je suis ici pour recevoir le prix Nobel de littérature»: le romancier français s'est livré lundi avec simplicité et humour aux questions des élèves du lycée français de Stockholm.
Qu'avez vous ressenti quand vous avez reçu la nouvelle du Nobel? Pourquoi avoir dénoncé la prostitution enfantine en Thaïlande? Comment écris-tu tes livres? Que pensez-vous de la chasse à la baleine? Quel est le livre que vous avez aimé le plus? Où vous sentez-vous chez vous? Aimes-tu la Suède?
Les questions fusent dans tous les sens et le Nobel de littérature 2008 - chaussures de jogging, jeans et polo noir - répond de plain-pied à ses jeunes interlocuteurs qui l'ont applaudi à tout rompre à la fin de la séance.
«Écrire un livre, c'est un travail comme la tapisserie. Il faut prendre cela par petits morceaux et coudre. Cela prend du temps. Il faut le temps de rêver aussi», explique Le Clézio à un élève qui voudrait savoir comment il fabrique ses romans.
La salle de spectacle du lycée Saint Louis étant trop petite pour accueillir tout le monde, deux fournées ont été organisées, une première pour les 8/10 ans et une autre pour les plus grands.
«Qu'as-tu appris de tous tes voyages»?, lance un enfant de CM2. «C'est pas mal comme question, c'est direct», dit en souriant l'écrivain avant de répondre: «Essentiellement s'adapter. Ce n'est pas facile».
Né dans une famille d'origine mauricienne (il a la double nationalité), Le Clézio souligne que «c'est une grande richesse d'appartenir à plusieurs cultures. Cela permet de relativiser».
Il raconte qu'il voulait être marin mais sa mauvaise vue l'en a empêché. «Je fais un peu le même métier. Je voyage aussi d'une certaine façon. En écrivant, on quitte ce qu'on connaît et on part à l'aventure».
Professeur à plusieurs reprises à travers le monde, Jean-Marie Le Clézio parle aussi aux enfants de leur chance de pouvoir apprendre, de leurs droits et de leurs devoirs.
«Ouvrez grands vos yeux et vos oreilles. Le monde est riche et la mémoire est un trésor inépuisable», leur dit-il.
«Soyez vrai avec vous-mêmes», leur conseille-t-il en citant William Shakespeare.
Le Nobel de littérature? «C'est une grande surprise pour moi. C'est une sorte d'émerveillement et de responsabilité. Il faut en être digne d'une certaine façon. Cela ne veut pas dire que je vais devenir plus sérieux. Je vais essayer de le mériter à l'avenir».
À un élève qui lui demande : «En quoi avez-vous changé l'humanité?», il répond que son objectif est plus modeste et que «comme la vie s'écoule assez vite, écrire, se souvenir, permet de la ralentir».
«Je n'écris pas dans l'idée de changer l'humanité. Ce n'est pas une seule personne qui peut le faire mais c'est tous ensemble qu'on peut y parvenir», explique-t-il.
Jeudi prochain, ce sera au tour des Nobel français de médecine, Luc Montagnier et Françoise Barré-Sinoussi, de venir au lycée français.
Tous recevront leur prix mercredi soir à Stockholm lors d'une grandiose cérémonie suivie d'un banquet en présence de la famille royale de Suède.
Agence France-Presse /Stockholm