Les scientifiques à l'emploi du gouvernement fédéral réclament le gel immédiat de la privatisation de l'inspection des aliments.
L'Institut professionnel de la fonction publique du Canada, qui représente 55 000 fonctionnaires, a soutenu lundi qu'autoriser l'industrie à s'autoréglementer met la population en danger.En supprimant les règles et en confiant la responsabilité de la sécurité à l'industrie alimentaire, le gouvernement fédéral joue avec la santé et la sécurité de nos familles, a déclaré la présidente du syndicat, Michèle Demers. Selon elle, il faut arracher les «oeillères idéologiques» qui empêchaient de critiquer l'autosurveillance et la déréglementation de l'industrie.
En juillet, des informations liées à une fuite de documents du conseil des ministres ont semblé indiquer que le gouvernement conservateur envisageait de confier plus de responsabilités en matière d'inspection des aliments à l'industrie alimentaire elle-même. Puis, en septembre, un syndicat de la fonction publique a invoqué un rapport secret du Conseil du trésor datant du mois de mai selon lequel les conservateurs comptaient se retirer des programmes d'inspection de la viande dans trois provinces de l'Ouest, pour économiser environ 3 millions $.
D'après Mme Demers, l'éclosion mortelle de listériose de cet été n'est «que la pointe de l'iceberg» des dangers de la déréglementation.
L'usine torontoise des Aliments Maple Leaf a été fermée en août dernier après avoir été associée à l'éclosion qui a fait 20 morts à travers le pays. De nombreuses voix se sont alors élevées pour réclamer une refonte du système d'inspection des aliments.
Mme Demers estime que la législation sur la protection des consommateurs est désuète et doit être modifiée pour donner aux inspecteurs le pouvoir de rappeler les produits non sécuritaires. Elle a appelé la nouvelle ministre de la Santé, Leona Aglukkaq, à relancer le projet de loi que le gouvernement Harper avait présenté pour moderniser la surveillance des produits et des aliments qui se retrouvent entre les mains des Canadiens. Ce projet de loi est mort au feuilleton lorsque les élections ont été déclenchées.
Dans le cas de la listériose et des usines Maple Leaf, les scientifiques membres de l'Institut réclament aussi une enquête indépendante et complète.
Dans un courriel, le ministre de l'Agriculture, Gerry Ritz, a affirmé que l'inspection des aliments constitue une responsabilité partagée. «Par son approche, notre gouvernement reconnaît que la sécurité des produits est dans l'intérêt de tous et que tous - Canadiens, industries et gouvernement - ont un rôle à jouer.»
L'Institut professionnel de la fonction publique a aussi accusé les conservateurs de museler et d'intimider les fonctionnaires.
Steve Rennie /La Presse Canadienne /Ottawa