La présidence française de l'Union européenne a lancé un appel lundi à Monaco pour un renforcement de la coopération scientifique internationale dans l'Arctique, un premier pas prudent vers une protection de cette fragile région menacée par le changement climatique.
«Il faut qu'il y ait un système de recherche unifié», a indiqué Jean-Louis Borloo, le ministre de l'Ecologie, représentant la présidence de l'UE lors d'une conférence internationale organisée avec la principauté de Monaco.
L'Arctique fait l'objet de nombreux programmes de recherche dans divers pays mais «pour autant ces recherches ne sont pas coordonnées», a souligné le ministre.
«Il n'est pas imaginable qu'il y ait des données scientifiques connues et non partagées», a-t-il estimé. «Nous allons mettre les moyens nécessaires pour qu'il y ait ce réseau mondial d'informations», a-t-il assuré.
Il s'agit de faire de l'Arctique un «observatoire» capable de relever les défis environnementaux avec la mise en réseau des différents centres polaires.
«Avec l'Arctique, on a un laboratoire pour mieux comprendre ce qui se passe avec le climat mais il n'est pas assez bien exploité», commente le climatologue français Jean Jouzel.
Par exemple, «on constate une accélération préoccupante de l'écoulement des calottes glaciaires» qui va provoquer une montée du niveau des océans mais «on ne sait pas assez modéliser» pour pouvoir donner une estimation maximale du phénomène, explique-t-il.
Les scientifiques espèrent que ce soutien politique pourra donner un nouvel élan à la recherche au delà de l'année polaire internationale qui s'achève en mars 2009.
Car la recherche est coûteuse dans ces régions aux conditions climatiques extrêmes.
«Il n'y a pas assez de satellites et de stations d'observation», souligne Dorthe Dahl-Jensen, climatologue de l'institut Niels Bohr (université de Copenhague, Danemark).
Cette approche purement scientifique de l'avenir de l'Arctique a paru timorée à certains qui plaident pour la mise en place d'un traité international de protection.
Ainsi, Laurent Mayet, président de l'ONG Le Cercle polaire, doute qu'un simple dispositif de coopération scientifique puisse conduire à un système de gestion de l'environnement arctique «dans la mesure où les querelles de souveraineté se font de plus en plus fortes».
L'UE doit compter avec les géants que sont les États-Unis, la Russie et le Canada, pays riverains de l'Arctique, vivement intéressés par ses réserves potentielles de gaz et de pétrole.
Le poids de l'UE n'est cependant pas négligeable: elle représente plus de la moitié des membres du conseil arctique avec la Suède, le Danemark et la Finlande, et ses associés (Norvège et Islande).
La question d'un éventuel traité sur la protection de l'Arctique ne se posera qu'après la conférence des Nations unies sur le climat prévue à Copenhague en décembre 2009, a indiqué Jean-Louis Borloo, jugeant que «mettre en place de nouveaux outils pourrait créer des tensions inutiles».
L'explorateur Jean-Louis Etienne propose de son côté de faire de l'océan glacial arctique une «zone d'intérêt commun pour l'humanité».
Contrairement à l'Antarctique, l'Arctique n'est pas protégée par un traité international.
Le Parlement européen s'est prononcé en octobre pour l'adoption d'un traité international pour la région, selon une résolution défendue par l'ancien premier ministre français Michel Rocard.
Emmanuel Angleys
Agence France-Presse
Monaco