Les aides domestiques étrangères ont trois fois plus d'accidents du travail que les Québécoises, révèle une étude publiée hier par un groupe de chercheurs de l'Université McGill.
Cette statistique a fait réagir vivement les groupes de défense des travailleurs immigrés puisque les aides domestiques n'ont droit à aucune compensation de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (CSST).«Notre étude a démontré que plus de 24% des aides domestiques étrangères ont souffert d'une maladie causée par le travail ou ont déjà eu un accident au boulot, explique la responsable de l'étude, Jill Hanley. Au Québec, ce taux se situe à environ 7%. Le problème, c'est que la CSST ne considère pas les tâches de femme de ménage ou d'aide à domicile comme dangereuses. Nos recherches viennent de prouver le contraire.»
Il y aurait environ 2100 aides domestiques étrangères au Québec et plus de 20 000 au Canada. L'étude de McGill est la première à lever le voile sur les conditions de travail des employées domestiques établies à Montréal.
Les chercheurs ont sondé 148 aides venues dans la métropole dans le cadre du programme d'Immigration Canada intitulé Aides familiaux résidents. Les «aides familiaux résidents» sont recrutés par des agences privées dans les pays du tiers-monde pour prendre soin d'enfants et de personnes âgées ou handicapées. Ces employés ont un permis de travail temporaire et demeurent chez leur employeur.
Des résultats inquiétants
L'étude de McGill révèle en outre que 43% des aides domestiques ne sont pas payées pour leurs heures supplémentaires. De plus, 16% des répondantes ont dit avoir été victime d'abus physiques ou psychologiques et plus de 7% d'entre elles ne recevaient pas le salaire minimum.
La présidente de l'Organisation des femmes philippines du Québec, Evelyn Calugay, a profité de la publication de l'étude, hier, pour demander au gouvernement de considérer les aides domestiques étrangères au même titre que les autres travailleurs du Québec.
«Les femmes qui sont victimes de mauvais traitements de la part des familles qui les embauchent sont vulnérables de par la nature même de leur statut», explique-t-elle. «Elles ont peur de les dénoncer, car elles craignent de compromettre leur demande d'immigration ou de se retrouver sans le sou durant plusieurs mois.»
«Même si elles sont blessées ou malades, plusieurs aides domestiques continuent de travailler, car elles doivent continuer d'envoyer de l'argent à leur famille restée dans leur pays d'origine», constate Jill Hanley.
Le Centre des travailleurs et travailleuses immigrants s'est dit particulièrement préoccupé par les résultats de l'étude, étant donné que les nouveaux arrivants au Québec doivent attendre au moins trois mois pour avoir droit à l'assurance maladie.
Dans les prochains mois, le Centre des travailleurs et travailleuses immigrants et l'Organisation des femmes philippines du Québec entendent se servir des résultats de l'étude pour demander au gouvernement de changer la loi qui encadre le travail des aides familiaux résidents
Daphné Cameron
La Presse